Etape 86 (2015) – Rio de Couros - Almoster – Ansiao : 28 km (2 162 km)
Je me lève tôt car je sais que j’ai un long chemin à parcourir aujourd'hui. Je découvre un temps froid et pluvieux. Il m’a fallu attendre pour prendre mon petit-déjeuner car le café n’était pas ouvert. Il est vrai que nous sommes le dimanche 23 août 2015, et que le dimanche, c’est sacré pour nos amis portugais très croyants. Ce qui m’est servi est copieux, et donc, tout va pour le meilleur du monde.
J’ai encore mal aux genoux, mais c’est moins prégnant qu’hier. Comment font ces femmes et ces hommes qui parcourent de longues distances à genoux ? Quel courage ou quelle folie selon !
Je reprends le chemin entrepris en début d’après-midi hier, chemin abandonné pour assurer mon gite d’hier. Je revois la caserne où règne un grand calme. Je revois mon pauvre chat déjà bien raide déjà attaqué par les insectes. J’entreprends maintenant un long chemin qui va me faire passer dans de beaux paysages même si le ciel est toujours aussi chargé. Aguas Formosas, Rio de Couros, Valongo…
Un moment donné, il n’y a plus de marque et je suis un peu pommé. Ma chance : un habitant passant en voiture s’arrête. Il parle très bien le français et me renseigne pour me remettre dans le droit chemin. Il m’indique même où ce jour particulier je peux m’arrêter pour faire des courses non loin de là, à Almoster. S’il est vrai que beaucoup de Portugais parlent correctement le français, c’est surtout leur gentillesse qui vous marque d’autant qu’elle est bien loin de celle de leurs voisins ibériques. Il n’y a pas photo… Et la suite de la journée va se révéler riche en ce domaine.
A Almoster, je fais donc halte au supermarché et au café. L’occasion de faire quelques courses dans ce lieu étonnant très fréquenté à voir le nombre de voitures qui stationnent un peu n’importe comment. Au café, c’est l’occasion de discuter avec des habitants de mon cheminement, de Fatima… Un vrai plaisir dans ces échanges. Le patron m’offre même un coca à emporter.
Un peu plus loin, je retrouve un autre village portant le même nom où se déroule la fête paroissiale. La musique est diffusée dans la rue. Je suis interpellé par un homme qui m’invite à partager un morceau de poulet grillé et un verre de vin. Il n’y a pas encore grand monde et tout se passe dans la joie et la bonne humeur. Le curé tient à venir me serrer la main en me souhaitant un bon pèlerinage.
Je reprends la route, toujours asphaltée et fréquentée pour parcourir mes huit derniers kilomètres du jour. Je suis fatigué, c’est le moins que l’on puisse dire. J’arrive enfin à Ansiao, une ville de 13 000 habitants, la fin de mon étape du jour. La cité est située sur la rivière Nabao. Selon la légende, la reine Isabelle se serait baignée dans le réservoir situé sous une des arches du pont de Cal en pierre, rendant ainsi ce réservoir miraculeux.
Comme d’habitude, je demande conseil au peu d’habitants rencontrés en ce dimanche. Ils m’indiquent que la plupart des pèlerins se rendent au residancial-restaurant Solar da Rainha situé à la sortie de la ville. Je m’y rends donc. L’hôtelier m’indique qu’il peut m’accueillir pour la nuit, mais qu’il ne peut pas me servir de repas le soir. Il accueille en effet un groupe pour une fête familiale. C’est alors qu’un monsieur imposant par la taille s’approche de moi et m’invite à partager leur joie.
C’est une famille nombreuse dont de nombreux membres sont venus de l’Hexagone. Après ma douche, je les rejoins pour partager, un peu en décalé, le repas qu’ils avaient débuté. J’ai droit notamment à du cerf… Étrange de manger cela pour un pèlerin. Nous parlons bien sûr du pèlerinage de Fatima, de mon cheminement sous tous ses aspects : physiques, spirituels… Je leur apprends qu’il existait cette route entre Fatima et Santiago de Compostela. Tout va se terminer autour d’un gros gâteau, arrosé d’un champagne (?) et de digestifs. Un vrai moment de bonheur pour le cheminant que je suis, un moment sortant de l’ordinaire.
Ce fut donc une belle journée, étonnante, où j’ai pu découvrir et apprécier le cœur généreux de nos amis portugais. Ana-Maria devrait être contente de cela.
Après cette journée, je n’ai pas eu le courage d’écrire et les bras de Morphée m’ont vite accueilli.
A suivre. Alain dit Bourguignon la Passion.