Étape 13 : Argentiers - Somail – Argens-Minervois - Homps : 41 km (352 km)
Après une nuit correcte, me voici prêt à reprendre mon cheminement. L’étape du jour restera plate en suivant le canal du Midi, contrairement au GR78 passant dans les collines avoisinantes. J’évite donc Quarante, Cruzy, Bize et Pouzols… Choix assumé pour garder des forces pour les Pyrénées.
Je passe par Argeliers et le Port de la Robine avant d’arriver à l’embranchement du Canal du Midi et du Canal de Jonction. Le canal de gauche se dirige en direction de Narbonne. Celui d’en face, en passant un petit pont, permet de continuer vers Le Somail, Carcassonne et Toulouse.
C’est ici que je rencontre un couple à vélo avec qui j’échange sur le Chemin de Compostelle. Après quelques minutes, chacun reprend son chemin, eux à vélo, moi à pied.
Un kilomètre plus tard, c’est le passage sur le pont-canal de la Cesse. Mesurant soixante-quatre mètres de longueur à quatorze mètres de hauteur, il fut construit à l'initiative de Vauban en 1689. Vauban, un homme attachant, véritable précurseur du Siècle des Lumières[1].
[1] Alain Lequien, Vauban le Bourguignon, éditions de Bourgogne.
Un peu plus loin, c’est Le Somail, un gros hameau touristique autrefois un port important de commerce. Je m’attable à un restaurant pour découvrir une sorte de paella locale. C’est alors qu’arrive le couple de cyclistes rencontré une heure plus tôt au pont de la Robine, Michèle et Michel. M’apercevant, nous décidons de faire table commune. Au moment de régler ma note, mes nouveaux amis me disent que je suis leur invité. Que dire ? J’accepte car il s’agit d’un geste fait de bon cœur. Merci encore à vous, Michèle et Michel, si vous lisez ces lignes.
En arrivant, j’avais remarqué le pont Riquet, un pont de pierre pavée en forme de dos d’âne surplombant le Canal du Midi. Avant de l’emprunter, je passe près d’une petite chapelle qui à l’origine accueillait les équipages de barques et les habitants des environs.
C’est alors que je découvre une plaque déposée en 2016 par l’association Les Ponts du Cœur, qui a choisi la culture pour inventer, initier et réaliser des ponts entre les peuples. Je ne peux qu’être sensible à une telle démarche.
Cette plaque porte l’effigie de Thomas Jefferson, un grand humaniste qui fut un trait d’union exemplaire entre les États-Unis et la France en étant l’ambassadeur de son pays auprès de Louis XVI. Passionné d’architecture, il découvrit l’œuvre de Pierre-Paul Riquet et de Vauban en 1787. Il a emprunté le Canal de Sète à Toulouse, un voyage de huit jours, et nous a laissé un mémoire[1] dans lequel il relate avec une grande précision les paysages entrevus, les hommes et les femmes, dans les champs, les plantes cultivées... Il résida d’ailleurs dans une auberge locale.
Dix kilomètres plus loin, c’est le pont-canal du Répudre. Il s’agit selon mes sources du premier pont-canal construit en France, le second au monde. Il fut le seul construit par Riquet, tous les autres étant l’œuvre de Vauban.
[1] Pierre Gérard : Le voyage de Thomas Jefferson sur le Canal, Loubatières-Toulouse 1995 (avec bibliographie).
Je continue mon chemin en espérant trouver un hébergement à Argens-Minervois. Hélas, nous sommes en week-end prolongé, et tout est plein. Je l’apprends en arrivant puisque contrairement à ce que m’avait laissé entendre la logeuse, elle ne m’a pas rappelé. Un manque évident de professionnalisme.
Il me faut donc continuer encore une dizaine de kilomètres pour trouver un gite près de Homps, jadis un des ports les plus importants du canal. Une petite anecdote : vers 1850, la sapine de Delsol, batelier de Moissac, chargée de trois-cent cinquante futs de vins fit naufrage en amont du port de Homps. Il fallut plusieurs jours d'arrêt de la navigation très dense en ce temps-là pour renflouer le bateau et dégager le Canal.
Belle journée terminée sous la pluie, avec de belles rencontres et toujours la beauté du canal.
A suivre. Bourguignon la passion.