Étape 19 : Mas d'Azil : 18 km (510 km)
Cette nouvelle étape est plus courte que d’habitude. C’est à la fois la nécessité de bénéficier du lieu de son arrivée mais aussi qu’il est bon par moment de ralentir sa marche lorsque l’on se trouve en bonne compagnie. En effet, hormis la qualité de mes compagnons de route, nous allons nous reposer au Mas d’Azil.
Ce lieu est loin d’être un village commun. Haut lieu de la préhistoire, ses grottes sont mondialement connues pour ses découvertes notamment le « faon aux oiseaux », un propulseur issu de la période magdalénienne et les fameux galets peints donnant son nom à la civilisation azilienne. Au fil du temps, la grotte devint un lieu de prière pour les premiers chrétiens au IIIe et aux cathares au XIIIe siècle. Elle aurait servi d’asile à Calvin au XIVe siècle, et aux protestants lors des Guerres de religion.
Après le petit-déjeuner pris en commun, André, Léon et Christian partent en avant. Les trois autres dont votre serviteur partent un peu plus tard. En suivant scrupuleusement le chemin après Gabre, nous retrouvons nos amis arrivant rapidement derrière nous : ils se sont trompés de chemin, se retrouvant au milieu des ruches. « Rien ne sert de courir, il faut partir à point » nous dit La Fontaine, cela s’applique bien à notre situation.
Nous décidons d’éviter le passage par Pailhes, qui apparait sans intérêt, nous raccourcissant l’étape de sept kilomètres. Sur le Chemin, il ne faut avoir faire des choix en évitant d’être trop accroché au chemin de grande randonnée qui font parfois des détours pour lequel on peut se poser des questions. D’autant plus si ce cheminant est parti pour marcher un mois ou deux. Il faut donc savoir conserver son énergie comme le faisait nos Anciens (ceux du Moyen Âge). Ce n’est pas le cas du randonneur d’un chemin de grande randonnée qui part souvent pour une durée moyenne (parfois quelques jours) avec un sac plus allégé. Et puis, disons-le, souvent nos intérêts sont rarement les mêmes.
Notre parcours passe par de nombreuses routes, puis des passages boueux en forêt. Je termine mon trajet avec Léon, avec qui j’ai de nombreux échanges. Nous arrivons les premiers au Mas-d’Azil. Ce village était autrefois appelé la petite Genève du canton, en référence à Calvin, l'une des figures emblématique de la Réforme. Le temple, inscrit depuis peu de temps comme Monument historique, date du IXe siècle étant autrefois l’église d’une abbaye de sœurs bénédictines.
C’est à la suite d’un accord avec l’évêque du lieu que le pasteur Bordes et sa communauté animent notre accueil de ce soir. Il reçoit environ deux cent cinquante pèlerins ou cheminants par an. Nous y sommes reçus avec bienveillance avec un fort engagement de la communauté protestante.
André, le passionné de photographie arrive un peu plus tard suivi de Corinne et Pierre-Yves. Beaucoup plus tard, Christian qui ne marche pas vite nous rejoignit. Comme souvent en groupe, chacun marche à son rythme, et c’est très bien comme cela.
Au fond du gite, nous découvrons une porte donnant par un escalier raide qui descend vers la pièce située du rez-de-chaussée. Curieux de cette bonne curiosité de la découverte et de l’insolite, nous découvrons une petite chapelle sur les murs desquels sont réalisées des fresques modernes bleues réalisées sur fond blanc. Je trouve cela émouvant, symbolique, et pour tout dire, enrichissant.
Nous passons la soirée autour de pizzas locales lorsque deux marcheuses nous rejoignent. Elles bénéficieront de notre partage du repas.
Moment poétique. Voici l’extrait du poème La Grotte écrit par Napoléon Peyrat, dit Napol le Pyrénéen sur cette grotte du Mas-d’Azil[1] :
[1] Napoléon Peyrat, La grotte d'Azil, Edition Lacour-Ollé.
« Pèlerins, nous venons voir la Roche sainte, Merveille de l’Arise, et fatidique enceinte, Où le Christ recueillit les enfants du Lion… Nous marchions à pas lents vers l’arche de l’aurore / Où le soir semble au loin comme une étoile éclore / Là, comme un bleu dragon l’Arise entre en rampant… »
A méditer et à suivre. Bourguignon la passion.