Étape 30 : Sainte-Colome - Savignacq-Meyracq - Buzy - Oloron-Sainte-Marie : 42 km (787 km)
C’est donc vers sept heures du matin que l’on vient me chercher pour prendre mon petit-déjeuner avant d’entamer mon cheminement du jour qui devrait me mener à Oloron-Sainte-Marie. Je suis bien reposé ayant dormi d’une seule traite. Petit-déjeuner copieux, mes hôtes du Café du Commerce (place Gaston Phoebus) ont l’habitude de recevoir des pèlerins qui font une pause dans leur parcours.
Après ce qui m’a semblé un détour en suivant le GR (il n’est pas toujours pèlerin, celui-là avec ses détours), j’arrive quelques kilomètres plus loin à Mafaget qui possède une commanderie implantée vers la fin du XIe siècle. Hélas, il est tôt, et tout est fermé. Je dois me contenter de cette esquisse réalisée devant. Je ne pourrais donc pas admirer cette statue pleureuse, Saint Plouradou, qui suintant, aurait eu pour effet, selon la tradition populaire, de guérir les enfants pleurnicheurs. Ah ! Les temps anciens avaient tendance à l’imagination pour tout ce qu’il ne comprenait pas !
Un cheminement dans des endroits de grande beauté.
Continuant mon chemin sous des paysages grandioses, et notamment un passage de gué, j’arrive à Sainte-Colome perché sur les hauteurs. Deux hommes préparent le passage d’un groupe de VTT. Je fais ma BA du jour en leur donnant un coup de main pour installer leur tente. Cela va se traduire par une belle photo, du coca et une banane pour votre serviteur. J’en profite, mais je n’avais pas besoin de cela pour m’arrêter à la belle église gothique flamboyant Saint-Sylvestre située à quelques pas de là.
Une dizaine de kilomètres plus loin, j’arrive à Buzy sans faire le détour par Arudy qui pour moi, se trouve en dehors du Chemin. Peut-être une erreur d’ailleurs, car j’ai appris plus tard que l’arrêt jacquaire était de qualité.
Mais alors, je n’aurais pas rencontré de nouveau Sylvie et Laurent que j’avais quitté à Lourdes. Pour rappel, ces deux pèlerins bordelais avaient ramené un souvenir de Santiago au cuisinier Loulou (voir étape 27), – voir étape avant Lourdes. En m’arrêtant à Arudy, nous ne nous serions pas revus. Comme quoi, chaque décision libre de contraintes que nous prenons peut avoir de l’importance sur la suite des événements.
En arrivant à Buzy, j’ai pris du temps à aller voir le dolmen qui se trouve à l’entrée du village.
Reprenant mon cheminement quelqu’un me klaxonne. Je fais un grand bonjour car cela arrive parfois que des personnes expriment par là un encouragement à nous, les pauvres marcheurs. Quelques minutes plus tard, alors que j’avais quitté la route pour un petit chemin, je reçois un coup de fil :
« C’est toi Alain qui marche sur la route à Buzy et que l’on vient de croiser ? ».
Je réponds : « Oui, je suis en effet à Buzy. Qui êtes-vous ? ».
La voix me répond : « C’est Laurent, on vient de se croiser. Tu n’es pas trop loin de la route ? On peut boire un café ensemble ? »
Bien sûr, j’accepte étonné de leur présence. Je les croyais en Espagne. En fait, ils se sont arrêtés plus tôt et avaient récupéré leur camping-car pendant le temps où j’étais remonté quelques jours à Dijon. Ils étaient accompagnés de leur fils.
Ce fut un moment fort en émotion et en partage car ce sont de belles personnes que j’estime. Et puis, ce fameux « hasard » qui joue un drôle de rôle. A une minute près, ce n’est rien quand on chemine dix heures par jour, rien de tout ceci ne se serait déroulé. Bizarre ! Bizarre tous ces événements qui s’imbriquent !
Je repars un peu surpris et heureux. Un peu plus loin, près d’une fontaine dite miraculeuse, je mange et me repose un peu. J’ai fait 22 kms et il m’en reste une vingtaine.
Les villages s’enchainent : Buziet où je rencontre des Anglais en balade, Ogeu-les-Bains, c’est un couple de marcheurs locaux, Herrère et j’arrive enfin au pont du diable. Pour y accéder, il m’a fallu suivre un sentier sinueux détrempé le long du gave d’Ossau. Pas le must quand on a déjà beaucoup marché.
C’est ensuite la descente vers Oloron-Sainte-Marie. C’est éprouvant. Il fait chaud et heureusement pour moi, des marcheurs m’offrent de l’eau. Et puis, voyant mon état de fatigue, un couple m’offre de m’emmener en ville en voiture. Je ne dis pas non pour économiser ces deux/trois derniers kilomètres sans intérêt pour aller en centre-ville. Il faut savoir accepter cette aide faite pour la bonne cause, avec générosité.
Je compte prendre couchage au gite jacquaire. Pour y accéder, je m’égare en ville et demande aide et assistance à l’accueil de l’Église Sainte-Croix. Le temps de jeter un œil dans l’église, et enfin, après plusieurs passages ici, je découvre ce joyau qu’est la coupole située à la croisée du transept. Une plus grande conscience de l’architecture après avoir relu Les Etoiles de Compostelle d’Henri Vincenot que je porte dans mon sac (en édition folio quand même). Elle est soutenue par des nervures carrées disposées en étoile à huit branches d’inspiration mozarabe. C’est un élément d’architecture rare proche de celle de la mosquée de Cordoue. Comme quoi, les influences entre les deux côtés de des Pyrénées sont fortes. La personne m’accompagne jusqu’au gite. Quelle gentillesse !
Je m’installe, prend ma douche, et une demi-heure plus tard, mon ami Mathieu avec qui j’ai cheminé jadis, et qui habite cette belle ville, vient me chercher. Nous allons manger un morceau en ville puisqu’au gite, rien n’est prévu. Malgré ma fatigue, je visite quelques lieux emblématiques. Merci mon ami. Toujours aussi généreux avec ses amis.
Ce soir, je vais bien dormir sans que l’on me berce.
A suivre. Bourguignon la passion.