Étape 16 : abbaye Fontaine-le-Comte – Coulombiers – Lusignan : 32 km (449 km)
Je pars relativement tôt après le petit-déjeuner pris seul dans la grande salle de l’hôtellerie. On est quand même loin de l’accueil généreux des hospitaliers. Je quitte l’abbaye sans rencontrer quiconque. Dans le village, même chose, pas âme qui vive. J’ai un peu de mal à trouver le marquage qui devrait me remettre dans la bonne direction, ce qui fait que je tourne un peu en rond.
Enfin, je retrouve quelques marques, aidé par Google sur mon smartphone. Pas très cheminant de l’ancien temps cela.
Au bout de huit kilomètres environ, après quelques petites routes et chemins, je rejoins Fontaine-le-Comte.
Le long de la voie de Tours, je passe à l’ancienne abbaye augustine Notre-Dame-des-Fontenelles fondée vers 1130 par le comte Guillaume de Poitiers. Il n’en subsiste de nos jours que l’ancienne abbatiale romane devenue église paroissiale (classée aux Monuments historiques en 1840) et quelques bâtiments conventuels. Il y a beaucoup d’animation à l’intérieur faisant penser à la présence d’un groupe de jeunes. Je continue mon chemin. .
Je trouve sur une piste cyclable un couple dont le mari doit entreprendre sous peu le Chemin. C’est l’occasion d’un arrêt et d’un échange sur Compostelle et le cheminement qu’il va entreprendre. Apprenant l’existence de mon ouvrage, il ira l’acquérir et viendra me le faire dédicacer le soir même au gite de Lusignan. Une belle rencontre par un homme passionné
Fontaine-le-Comte : abbaye augustine Notre-Dame-des-Fontenelles.
Je continue mon cheminement qui me fait passer par de nombreux détours par Coulombiers. J’y rencontre un pèlerin belge qui a de grandes difficultés à marcher. Je marche un temps avec lui. Il est très inquiet, car il a marché quelques jours avec une jeune compatriote qu’il n’a pas revue. Il est très protecteur et me demande de ses nouvelles, ce que je n’ai pas. À un carrefour où il y a deux routes différentes pour aller à Lusignan, nous nous quittons. Je ne le verrai au gite que plus de deux heures après mon arrivée.
C’est maintenant l’arrivée à Lusignan, patrie des seigneurs de Lusignan qui furent rois de Chypre, de Jérusalem et d’Arménie. Mais aussi, la cité-berceau de la légende de la Fée Mélusine, un des principaux personnages féeriques du Moyen Âge.
En voici une version parmi d’autres.
« Mélusine, maudite par sa mère, était condamnée à avoir chaque samedi le corps transformé en queue de serpent dès le nombril. Elle rencontre Raymondin et lui offre sa main à la seule condition qu’il renonçât à la voir ce jour fatal. Raymondin consent à ce mariage et devient le plus puissant seigneur du Poitou. Dix garçons, tous affligés d’un signe étrange, naissent de cette union. Mais un samedi, persuadé d’être trompé, Raymondin transgresse l’interdit et surprend son épouse prenant son bain à moitié serpente. Son secret dévoilé, Mélusine se transforme alors en dragon, et survole les tours du château de Lusignan avant de disparaître à jamais. » La légende raconte que chaque samedi elle revient hanter Lusignan, théâtre de sa destinée.
Lusignan : acceuil jacquaire et halles.
La cité se dresse sur un promontoire rocheux dominant la vallée de la Vonne, dans un magnifique cadre de verdure.
Pour réserver sa place au gite municipal, il faut aller au camping de Vauchiron situé en contrebas. Située en bord de rivière, sa plage surveillée est très fréquentée. Pour rejoindre le gite jacquaire de six places situé dans l’ancien château, il faut faire une belle grimpette. C’est simple et propre.
Après l’installation, la douche, le lavage du linge de corps et un peu de repos, j’entreprends la visite de cette cité célèbre. Tout d’abord, les très belles halles datant du XIXe siècle construites sur l’emplacement des halles médiévales.
Supportée par deux rangées de huit poteaux de bois sur des socles de pierre, la toiture de tuiles est portée par une belle charpente à cabochons de bois. On peut y voir des sarcophages carolingiens.
Puis c’est la tentative de visite de l’église fermée. Dommage ! Édifiée au XIe siècle, elle fut remaniée à plusieurs reprises.
C’est en raison des liens historiques qui unissent Lusignan et l’Arménie qu’un mémorial arménien (stèle de pierre gravée appelée Khatchkar) a été érigé à Lusignan en 2014.
Ce Khatchkar du Souvenir fut érigé en hommage à Léon V de Lusignan, dernier roi qui régna sur la Petite Arménie de 1374 à 1375, un royaume créé en Cilicie par les Croisés. Il est dédié à la mémoire des Victimes du Génocide arménien de 1915 reconnu par la France en 2001 et des Volontaires arméniens de la Légion d’Orient morts pour la France au cours des deux Guerres mondiales.
Anatole France disait : « Nous louons l’Arménie de cet invincible amour qui l’attache à notre civilisation. Car l’Arménie est unie à nous par des liens de famille, et elle prolonge en Orient le génie latin. Plus de cinq cent mille Arméniens sont morts pour notre cause, et notre nom sur les lèvres. »
En son centre, la croix arménienne ornée de doubles volutes à chaque branche désignant la renaissance et le Christ rédempteur. Elle est encadrée de motifs floraux symboles de la puissance vitale, du renouveau de le l’Arbre de vie. La croix repose sur un disque solaire qui symbolise la lumière divine et l’éternité. L’Arménie est le premier État à avoir adopté le christianisme en l’an 301.
De retour au gite, je retrouve notre Belge, mais aussi la jeune fille dont il m’avait parlé accompagnée d’un caméraman qui filme le chemin. Nous irons manger ensemble un morceau au camping, seul lieu ouvert. Coucher vers 22h00.
À suivre. Bourguignon la Passion.