1 — Calais – Sangatte — Wissant (21 km)
Il est 7 h 30 lorsque je quitte l’auberge de jeunesse de Calais après le petit-déjeuner compris dans le prix de l’accueil comme dans toutes les auberges de jeunesse. Il est servi à table pour respecter les barrières sanitaires. Un grand « chapeau » à ce centre européen se montrant à la hauteur en temps de pandémie. Merci pour leur gentillesse et leur engagement.
Dans le calme du matin, je termine ma visite de la cité nordiste avant de rejoindre le parcours de la Francigena passant par la plage, longeant la Côte d’Opale. Hier soir, lors d’une sortie rapide en ville pour boire un verre, les terrasses étaient pleines à craquer comme dans une période habituelle.
Ce matin, le temps est frais et venteux, le ciel couvert. Tout commence par un cheminement sur la plage, les pieds s’enfonçant dans le sable sec. Pour ceux qui ne connaissent pas cette sensation, il faut faire des efforts importants pour avancer dans un sol mouvant. Cela va être le cas en grande partie jusqu’à Sangatte, un lieu connu pour la présence de nombreux migrants voulant rejoindre l’Angleterre.
Il est vrai que le tunnel sous la Manche se trouve à peu de distance de là.
Le tracé, indiqué par les marques blanche et rouge du GR 145, quitte la plage pour passer dans les dunes. Si certains endroits restent sablonneux, d’autres, plus stabilisés, permettent d’avancer plus rapidement. Peu à peu, je rejoins le bord de mer de Sangatte sur le long tracé aménagé. Je rencontre des joggeurs, des cyclistes, quelques familles se rendant à la plage.
À la sortie de Sangatte, de nombreux véhicules, notamment des camping-cars, envahissent le bord du chemin. Il y a surtout des Belges, des Néerlandais, des Anglais… J’en suis étonné de cette présence avec tout ce qui se passe autour de nous. C’est bien pour l’économie locale. Sous mes pieds le tunnel sous la Manche...
Aux alentours de Sangatte.
Je quitte le bord de plage pour monter un chemin pierreux allant vers une colline dénommée le mont d’Hubert passant près d’Escalles, à 150 mètres d’altitude. Ce nom est dû à Hubert Latham, un pionnier de l’aviation française qui, le 19 juillet 1909, tenta de survoler la Manche quelques jours avant Charles Blériot. Cette éminence paraît faible, mais le soleil étant apparu, je suis obligé de m’arrêter dans la montée pour reprendre mon souffle. Il est vrai que c’est mon premier jour de marche en portant un sac à dos bien chargé. J’y fais halte pour prendre ma collation du matin. J’ai droit à de nombreux bonjours de personnes passant sur le chemin, étonnées, semble-t-il, de voir un pèlerin. A priori, ici, on ne connaît pas la Francigena.
Reprenant mon parcours, je rejoins le sommet du Cap Blanc-Nez où trône l’obélisque commémorant la Dover Patrol, la Patrouille de Douvres, venue défendre le trafic de la Manche contre les raids de la flotte allemande lors de la Seconde Guerre mondiale. Le parking de ces falaises de craie et de marne est plein. Il y a trop de monde. Je fais l’impasse de m’y rendre, car trop touristique à mon goût.
J’entreprends rapidement la descente raide et sécurisée au milieu d’une file indienne ininterrompue de personnes. Des familles de touristes, quelques marcheurs jusqu’au Cran d’Escalles. Le bâton est bien utile pour retenir le poids du sac. En bas, quelques familles ont envahi les lieux pour pique-niquer. J’ai hâte de m’éloigner de cette foule bruyante.
Après quelques centaines de mètres, il ne reste plus beaucoup de monde. Le chemin est agréable et vallonné jusqu’au village de pécheurs de Wissant. Avant de me rendre au camping, je fais une halte sur la plage. Il n’y a pas beaucoup de baigneurs, quelques surfeurs d’une école dans leur tunique noire. C’est l’opportunité de faire trempette des pieds dans une eau malgré tout bien fraîche.
Le ciel se couvrant de nouveau, le vent augmentant, une petite pluie fraîche se met à tomber. Le k-way est le bienvenu. Je me rends au camping municipal de La Source. Il est quasiment plein. Le préposé me demande de chercher moi-même une place. Je tourne en rond pendant une demi-heure avant de découvrir un petit endroit pour poser la tente. Ouf ! je me voyais déjà en train de chercher une autre solution en dehors du village. À peine installé, une pluie drue et fraîche se met à tomber. Débuts difficiles, je suis un peu frigorifié.
J’aurais aimé retourner au village pour mieux en profiter. Dommage, j’aurais pu découvrir le flobart, ce bateau de pêcheur à clins, formé de planches de bois d’orme se recouvrant les unes aux autres. Sa coque ventrue, son fond plat, sa dérive mobile et escamotable lui permettent de s’échouer plus facilement sur la plage sableuse et de tenir la mer par tous les temps.
Quelques courses au Spar du coin « dégustées » au bord de la tente. Bientôt, sans demander mon reste, la fatigue me gagne. Je m’installe dans mon sac de couchage. Malgré la fraîcheur, assez rapidement, je m’endors.
À demain… Alain dit Bourguignon la Passion