26b – Visite de Langres
De ses hauts remparts comprenant douze tours et sept portes, Langres se présente comme une fière cité aux confins de la Champagne et de la Bourgogne. Cité natale de Denis Diderot. Connu de son vivant comme le maître d’œuvre de l’Encyclopédie, entre philosophie et littérature, roman et théâtre, il édifia une œuvre riche, complexe, originale, représentative du siècle des Lumières. Sa modernité ressort de son goût pour les idées neuves, de sa curiosité pour les sciences, de la hardiesse de sa pensée. Sa statue trône sur une placette, non loin de la cathédrale.
Ma première visite factuelle est pour la cathédrale toute proche classée aux Monuments historiques depuis 1862. Elle est dédiée à saint Mammès, un berger de Cappadoce devenu martyr au 3e siècle. Selon la légende, les lions refusant de le dévorer, les Romains décidèrent de l’étriper au moyen d’un trident. Édifiée au 12e siècle, elle était le siège d’un vaste diocèse situé entre Champagne et Bourgogne. L’évêque puissant était duc et pair du royaume (comme à Laon). Jusqu’en 1731, Dijon ne possédant pas d’évêché, l’évêque de Langres avait la responsabilité ecclésiastique de la cité des Ducs de Bourgogne.
Son style s’apparente à l’abbatiale romane Cluny III édifiée à la fin du 11e siècle. Subissant des influences artistiques diverses, elle associe harmonieusement un décor et des volumes romans avec les premières innovations gothiques. L’emploi de la voûte sur croisées d’ogives donne au vaisseau une largeur et un éclairage plus importants que dans les autres édifices clunisiens. En effet, longue de 94 mètres, large de 24 mètres, sa hauteur sous voûtes est de 23 mètres. Des tours culminent à 45 mètres.
Langres : cathédrale et ancien cloitre.
Reconstruite en 1768, l’imposante façade néo-classique se compose de deux tours encadrant un avant-corps sommé d’un fronton surmonté de deux statues monumentales représentant la Synagogue[1] et l’Église. Chacun des trois niveaux est scandé par des colonnes ou des pilastres reprenant les trois grands ordres d’architecture : dorique, ionique et corinthien. Elle devint en 1793 Temple de la raison, en 1800, grenier à fourrage avant d’être rendue au culte en 1802.
Au fil de la visite, on peut découvrir des tapisseries de Saint-Mammès, des tableaux représentant la légende de saint Amâtre, un saint du 4e siècle devenu évêque d’Auxerre… Dans la salle du Trésor que je n’ai pu visiter, il y aurait un buste-reliquaire contenant le crâne supposé du saint patron rapporté de Constantinople, un reliquaire contenant un morceau de la vraie Croix donné par l’abbaye de Clairvaux…
En sortant, je me rends à l’endroit où existait naguère un cloître. Initialement constitué de quatre galeries entourant un jardin, c’était le lieu clos réservé au recueillement des chanoines. De nos jours, il n’en reste que deux côtés. Au centre, une œuvre contemporaine.
[1] Au Moyen Âge, la Synagogue était représentée « sous les traits d’une femme aux yeux bandés et au visage incliné vers le sol, contrite de n’avoir su reconnaître en Jésus le Messie » (David Covelli). Au 18e siècle, le judaïsme étant moins dénigré : la Synagogue est personnifiée par une femme un peu âgée tenant les Tables de la Loi.
Mon parcours m’amène maintenant à suivre le chemin de ronde, une balade de 3,5 kilomètres permettant d’avoir un beau panorama sur les vallées environnantes. Perchée sur son éperon rocheux à 475 mètres d’altitude, la cité fut successivement oppidum gaulois, capitale du peuple Lingon, siège de l’évêché et place forte royale… Chaque époque apporta sa touche, transformant le système défensif langrois en un véritable livre d’histoire, retraçant 17 siècles de fortifications. De ce long passé militaire, Langres conserve un patrimoine remarquable avec 3,5 kilomètres de chemin de ronde jalonné de 12 tours et de 9 portes.
Classée place forte au 19e siècle, son système défensif se développe ensuite sur un périmètre de 13 km, avec une vaste citadelle et une trentaine d’ouvrages dont huit forts détachés, au point de faire de Langres la plus grande enceinte fortifiée d’Europe…
Lors de mon parcours, mon attention est attirée par une automotrice d’un chemin de fer à crémaillère. Au 19e siècle, ce chemin de fer à crémaillère fut le premier créé en France, reliant sur 1 500 mètres la gare située dans la vallée à l’ancienne cité sur les hauteurs. Une montée de 132 mètres. Électrifiée en 1935, son activité cessa en 1971.
Près de la tour Saint-Ferjeux, la terrasse accueille depuis 1989 une œuvre du sculpteur néerlandais Eugène Van Lamsweerde, intitulée L’air et les songes, en hommage au philosophe champenois Gaston Bachelard.
Langres : sur le chemin de ronde.
Autre rencontre étonnante et intéressante, les membres de la Compagnie des Hallebardiers proposent aux passants et visiteurs de tester le maniement de cette arme ancienne. À mon arrivée, leur démonstration était terminée. Cela me permit de prendre ce cliché pour la postérité.
J’atteins maintenant la Tour de Navarre (les comtes de Champagne étaient également rois de Navarre) située sur le terrain de l’actuel camping. Cette tour d’artillerie de 28 mètres de diamètre sur une hauteur de 20 mètres possède une vingtaine d’embrasures de tir réparties sur quatre niveaux. Hélas, non visitable lors de mon passage.
Et encore plein d’autres choses à découvrir…