9 – Boisieux-Saint-Marc – Bapaume : 28 km (230 km)
Je quitte Arras en passant devant la citadelle de Vauban, un des hommes qui m’a le plus marqué par ses positions successives sur l’égalité de tous devant l’impôt, et sa réprobation de la révocation de l’Édit de Nantes. Un vrai précurseur du Siècle des Lumières.
Promu Commissaire général des fortifications du Royaume, Vauban la fit construire entre 1668 et 1672 avec pour objectif de défendre, avec celle de Lille, les frontières nord de la France de Louis XIV. Elle ne fut jamais assiégée si bien qu’elle fut surnommée de « belle inutile ».
Elle forme un pentagone composé de cinq remparts, les courtines. Cinq bastions abritant des poudrières renforçaient la défense. 1500 soldats pouvaient y résider.
Le Mur des Fusillés, très émouvant, témoigne du massacre de 218 membres de la Résistance, fusillés dans les fossés durant la Seconde Guerre mondiale. Elle abrita pendant plusieurs siècles des militaires jusqu’en 2008.
Véritable village dans la ville, elle est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Elle abrite des entreprises, des logements et même un accrobranche. Hélas, je n’ai pas eu le temps de la visiter, mais je reviendrais, comme touriste.
Me dirigeant vers la campagne, je m’arrête dans un bar pour prendre un café croissant. L’ambiance est morose, je suis seul. Le chien imposant du patron vient me sentir en lançant un petit jappement avant de retourner à sa place. « Vous inquiétez pas, m’avait lancé le patron, il n’est pas méchant ! » Mon œil, je n’aimerais pas me trouver seul avec lui. Je quitte rapidement les lieux.
Le parcours est aisé, le ciel brille de mille feux si bien que je me suis mis à l’aise.
Mon parcours me fait passer devant le cimetière britannique imposant où reposent 2 650 soldats du Commonwealth, ainsi que quelques prisonniers de guerre allemands. La plupart ont trouvé la mort lors de la bataille d’Arras lancée le 9 avril 1917 qui fit 100 000 victimes dont plus de 37 000 tués ou disparus. Un moment tragique de notre histoire. Marcher sur un chemin de pèlerinage, c’est aussi penser, réfléchir, se recueillir sur les lieux tragiques où sont tombés les défenseurs de la liberté.
Après ces moments émouvants, je continue mon cheminement vers Boisieux-Saint-Marc jusqu’à la chapelle Notre-Dame-de-la-Salette. Construite en 1934, elle abrite une Vierge acquise par un curé du village né à La Salette (Isère). Chaque année, une procession s’y déroule.
Après un passage en forêt, je croise Dominique qui attend une pèlerine anglaise qui semble en difficulté. Il me raconte son histoire, m’indiquant qu’il est là pour l’aider et porter son sac à dos. Je ne savais pas alors que ce soir, j’allais la rencontrer. Il m’explique aussi que dans les cimetières de la région, les croix des tombes allemandes sont noires alors que celles des Alliés sont blanches.
Quelques photos du Chemin : Dominique, Sapignies, cimetière allemand...
De nouveau, je croise une petite chapelle en briques située sur un petit monticule, dédiée à Notre-Dame de Montaigu. La légende raconte qu’un cocher embourbé à cet endroit avec son attelage fit le vœu de construire une chapelle si lui et ses chevaux se sortaient de ce chemin sans encombre. Son vœu exaucé, il a tenu sa promesse.
Je continue mon chemin, Hamelincourt, Gomiécourt, Sapignies (église reconstruite en 1918, cimetière allemand) avant d’arriver à Bapaume, terme de mon étape du jour. C’est la fête foraine, avec peu de monde d’ailleurs.
Ce soir, je dors chez une accueillante près du centre du bourg. Dans la chambre voisine, l’Anglaise dont m’a parlé Dominique sur le Chemin. Il semble qu’elle soit arrivée en bus ? Pour l’instant, aucun contact.
Mon accueillante ne proposant que le petit-déjeuner, je sors en ville pour me restaurer dans un petit restaurant. Nous ne sommes que trois à table. La tenancière me dit qu’elle envisage de fermer, c’est devenu trop dur. Je la comprends, l’activité est très réduite.
Bapaume est situé au carrefour de l’Artois, des Flandres et de la Somme. Durant les deux guerres mondiales, la ville fut le théâtre des nombreux combats. Les monuments détruits ont, pour la plupart, été reconstruits. La ville est décorée de la Croix de la Légion d’honneur et de la Croix de Guerre.
L’architecture actuelle de l’Hôtel de Ville reconstruite vers 1930 s’apparente au précédent, construit entre 1583 et 1611 et détruit le 25 mars 1917 à la suite de l’explosion d’une bombe à retardement laissée par les Allemands. Il y eut 21 morts. Son beffroi culmine à 55 mètres.
L’église Saint-Nicolas fut reconstruite à la même époque, en s’appuyant sur les plans de l’ancienne église flamboyante et baroque des 16e et 17e siècles. Une belle réalisation.
À demain… Alain dit Bourguignon la Passion