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Publié par Alain Lequien

  À 6h00, je quitte le refuge familial de Vilachá après un solide petit-déjeuner. J’ai récupéré et suis en pleine forme. Je veux pouvoir faire une trentaine de kilomètres le plus tôt possible, la météo locale annonçant une pointe de chaleur autour de quarante degrés à 14h00. Pas question de marcher sous le cagnard, cela prend trop de forces. De plus, il me faut du temps pour mettre à jour mes chroniques et autres écrits si je veux en conserver le vécu au quotidien avec les émotions ressenties du moment sans les déformer.

   Je suis donc seul, plusieurs de mes compagnons de la veille ont déjà repris la route à l’exception d’un Espagnol. La nuit est encore présente, mais comme j’aperçois les lumières de Portomarín, et que le chemin de terre est blanc, il est relativement facile de se diriger sans perdre sa route malgré l’absence de lampe. Je me mets à la place de nos anciens qui n’avaient pas cet ustensile et qui devaient se diriger ainsi de nuit en faisant attention à chaque moment où ils mettaient les pieds. Sans oublier les loups et autres bêtes sauvages comme ses voleurs qui n’hésitaient pas à les dépouiller. Ce temps est dépassé, heureusement.

   Lorsque j’arrive, le fléchage m’amène au centre-ville en passant le pont sur le Rio Miño, à 400 mètres d’altitude. Pour ne pas se perdre sur le Camino, il faut viser l’église, l’Iglesia. On est quasiment certain de retrouver les marques indiquant le Camino. Un bar est ouvert. Ouf : je peux prendre mon traditionnel café américain. Allez savoir pourquoi ce nom d’ailleurs ? C’est ainsi et c’est pratique.

   Comme il me reste que cinq euros, je dois retirer au distributeur quelques subsides bien utiles. Ici, tout se paie cash. Un conseil à mes lecteurs, ne retirez pas trop d’argent et répartissez-le dans vos affaires. Question minimale de sécurité. J’avais donné ce conseil à Roman (l’Autrichien) qui affichait trop sa liasse de billets de cinquante euros. Une provocation à éviter pour ceux qui n’ont pas les moyens financiers.

   Pour les raisons déjà exposées, je ne traine pas, car de toute façon, je perdrais plusieurs heures : rien n’est encore accessible. Je prends la route de Toxibó, puis du Monte de  Torros, plus de deux cents mètres de dénivelé. Et toujours des photos du soleil levant. J’adore.

   Arrêt buffet à Gonzar où le bar et la terrasse sont déjà pleins de pèlerins, j’allais dire touristes (c’est mon mauvais esprit du matin) dont de nombreux vélos. Cela promet pour la suite. Il est vrai que maintenant, nous sommes dans les cent derniers kilomètres. Il y a de nombreux Espagnols (68% des diplômes délivrés) qui ne réalisent cette distance que pour avoir le fameux sésame que l’on brandit avec fierté. On est loin de la démarche des autres pèlerins effectuant plus de mille kilomètres comme votre serviteur ou Charles parti quasiment du Puy. C’est la vie, et il faut l’accepter.

   En route, un petit bâtiment galicien typique où l’on faisait sécher le maïs. Ces bâtiments sont-ils encore usités ? Je n’ai pas eu de réponse claire.

   C’est la montée vers Castromaior, puis Hospital da Cruz, à 700 mètres d’altitude. Encore trois cents mètres de dénivelé. La nature est toujours aussi magnifique. La Galice est un beau pays, bien vert et coloré. C’est ensuite l’arrivée à Ventas de Narón avant de redescendre sur Ligonde, puis Airexe où l’on peut admirer des sculptures étonnantes. En passant, une association catholique offre du café et des conseils pour le sac. Un peu tard, non ?

   J’arrive en vue de Portos. Je n’ai pas le temps de faire le détour de cinq kilomètres pour aller voir à Vilar de Donas son église romane à fresques. À programmer pour la prochaine fois. Je continue vers Palas de Rei, une ville de 3 600 habitants possédant de nombreuses albergues pour faire face à l’afflux des pèlerins. Pas question pour moi de rester d’autant qu’en passant, j'en vois un grand nombre attendant l’ouverture (généralement vers 13h00). On m’avait dit que ce serait une galère. Oui, si l’on reste dans les villes étapes.

   Je me rends à l’église, mais je n’ai que le temps d’entrer, une femme ferme la porte derrière moi. Il est vrai qu’il y a de nombreux vols et qu’il apparait nécessaire de protéger leurs valeurs. Le temps de passer quelques instants, on me fait sortir par une porte annexe. Comme d’ailleurs le couple rencontré à plusieurs reprises dans d’autres lieux de culte.

   Je prends la direction de Melide, mais j’ai l’intention de m’arrêter à la première albergue rurale que je rencontre. Comble de chance, il y a de la place et j’ai un lit pour dix euros, plus dix euros pour le cenna, le repas du soir.

   Après la douche, je dors deux heures puis je mets à jour mes chroniques.

   Le repas du soir, fait de soupe, de salade et de viande de porc fut copieux, sans plus. Rien de transcendant. À 22h00, je vais dormir. Demain est un jour nouveau… si le soleil se lève bien entendu. Il reste 61 kilomètres à parcourir pour Santiago. Deux jours ?

   À demain - Alain, Bourguignon la Passion.

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