Étape 83a : Muxia – Santiago de Compostela, au musée des pèlerinages
Comme la plupart des pèlerins, je suis obligé de me lever très tôt pour prendre le bus de retour vers Santiago. Le jeune asiatique dormant sur le lit au-dessus du mien a égaré son portefeuille. Il serait tombé sur le mien. Nous le cherchons ensemble, en vain ! Cela arrive parfois qu’il y ait ce genre d’incident regrettable. En ce qui me concerne, c’est la première fois. Je suis bien sûr gêné même si je n’ai rien à me reprocher. Lorsqu’il me rejoignit au bus, il m’annonça qu’il l’avait retrouvé. Ouf ! C’est mieux ainsi.
À la station de bus, Octave me dit qu’il part en stop. Il a dû faire une tentative négative puisqu’avant le départ, je le vois revenir rapidement. Pendant la première partie du trajet, nous parlons du compagnonnage, un sujet qui l’intéresse beaucoup. Il est vrai qu’il veut devenir architecte.
Nous sommes balancés par le mouvement du bus effectuant de nombreux détours dans les villages, ce qui entraine qu’à un moment, nous somnolons.
Arrivé à Santiago, nous allons au café Casino, un établissement de la Rúa do Vilar, où je suis allé boire un verre avec Guy quelques jours auparavant. Son nom vient de la présence initiale d’un ancien casino. Étonnant dans une ville de pèlerinage ? Le cadre est remarquable, style Arts Déco des années 1920 avec cheminées, moulures, miroirs... Assis dans d’élégants vieux fauteuils, nous prenons un petit-déjeuner pour un prix modique comparé au même en France. Le service est efficace et rapide. Cela nous change de la rudesse du chemin.
Après la réservation du train pour le lendemain, nous décidons de visiter le très beau Museo das Peregrinacións (musée des pèlerinages)[1]. Il permet au visiteur, sur trois étages et huit salles et au travers de documents, de vidéos et de maquettes de comprendre l'origine du culte de saint Jacques. On y voit les évolutions de la construction de la cathédrale et l'essor du phénomène du pèlerinage. Sans oublier le développement progressif des différents chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle et l'influence des pèlerinages sur le déploiement artistique des corps d'artisans de la ville.
[1] Entretemps, il a été fermé pour être rénové.
Un modèle de croix de consécration est présenté de façon détaillée. Dans la cathédrale de Saint-Jacques de Compostelle, elles sont au nombre de douze datant de 1211. Rappelant les douze Apôtres, elles ont été disposées le jour de sa consécration. Elles présentent dans l’angle supérieur la représentation du soleil et de la lune (parce que dans la cité céleste, il n’y a ni jour ni nuit), et dans l’angle inférieur la représentation de l’alpha et de l’oméga (parce qu’il n’y a ni commencement ni fin).
Octave, en bon étudiant en architecture, est très emballé par tout ce qu’il voit, notamment la maquette de la cathédrale qui permet d’avoir une bonne vision d’ensemble de l’édifice et du travail sur le chantier lors de son édification.
Au dernier étage, une exposition temporaire sur la présence du vin dans la Bible. C’est l’occasion de parler de l'ivresse de Noé qui fit découvrir sa nudité devant ses fils. Voici ce qu’en dit la Bible (Genèse IX, 20 à 25).
« Noé commença à cultiver la terre, et planta de la vigne. Il but du vin, s'enivra, et se découvrit au milieu de sa tente. Cham, père de Canaan, vit la nudité de son père, et il le rapporta dehors à ses deux frères. Alors Sem et Japhet prirent le manteau, le mirent sur leurs épaules, marchèrent à reculons, et couvrirent la nudité de leur père ; comme leur visage était détourné, ils ne virent point la nudité de leur père. Lorsque Noé se réveilla de son vin, il apprit ce que lui avait fait son fils cadet. Et il dit : maudit soit Canaan ! Qu’il soit l'esclave des esclaves de ses frères ! »
Quand on sait que lors de l’évangélisation de l’Amérique, les Indiens étaient considérés comme des êtres maudits, issus de la race de Cham, le fils indigne de Noé... Il en sera d’autant en Afrique, justifiant pour une part par certains l’esclavage…
À suivre, lors de la visite au Portique de la Gloire.