Pas de petit-dejeuner de prévu donc juste un thé vert de secours sorti de ma besace,un petit bout de pain et ma banane de secours. Les occupants de la chambrée sont déjà partis. Les Anglais ont décollé vers 5h40 et l'Espagnol vers 6h30, tous respectueux de ne pas faire de bruit. Étant le dernier, je vois arriver la tenancière peu aimable étonnée de me voir encore là.
Je prends la direction de l'Arche de Caparra, le reste d'un monument et d'une cité romaine importante de la route de l'argent. Six kilomètres vont être nécessaires sous un soleil déjà très présent. Mais avant d'y arriver, je passe au milieu d'une énorme ferme d'élevage réputée pour ses taureaux comme l'indique l'entrée de la propriété. Je ne suis pas du tout fana de la tauromachie, mais je doit reconnaître l'engouement des gens de la région pour cette tradition. À voir leurs comportements quand ils sont réunis devant la tv, c'est identique à un match de Séville ou du Real de Madrid.
Quand j'arrive à Caparra, le gardien du site vient juste d'ouvrir les grilles qui protègent les fouilles. Ce n'est sans aucune mesure avec Italica dont je vous ai déjà parlé au nord de Séville, et que j'avais trouvé décevant. C'est vraiment fantastique et bien conservé, et cela vaut largement le détour. Cet arche représente toute la puissance romaine de cette époque de conquête.
Je reprends le chemin la tête remplie de ces belles images en imaginant ces légionnaires venus de lointains pays, laissant leurs familles pour souvent venir mourir à la gloire de Rome et de son empereur. Drôle de destin quand même.
Je passe de champ en champ en faisant attention de fermer la barrière à chaque passage. C'est depuis le début de cette voie une constante dont je ne vous ai pas parlé tellement ce geste est devenu familier et automatique. Il faut faire très attention à cela pour éviter que les animaux qui peuvent paître dans de grandes superficies parfois ne s'échappent. Et puis, il y a ces fameux passages de sortes de grilles de quatre mètres sur deux posées à même le sol dont qui les espacements empêchent les animaux de passer. Moi même, en les passant, je fais toujours attention que mon pied ne glisse pas dans les intercisses. Cela, c'est du quotidien.
Et puis, il y a les rios, ces fameuses petites rivières d'un ou deux mètres de large qui sont très nombreuses. Depuis le début, j'ai du en traverser une bonne centaine. Je ne pensais pas que le sud de l'Espagne pouvait avoir autant d'eau. Je pensais que c'était plus aride. Comme quoi, il faut savoir évacuer les images d'Épinal toutes faites. En les traversant sur des pierres souvent posées à la va-vite, il faut faire très attention de ne pas glisser. Ce n'est pas trop l'eau qui serait gênante, ce n'est pas profond, mais plutôt le risque de se blesser.
Alors que justement je traversais l'un d'eux un peu plus difficile pue les autres, voilà qu'arrive un jeune couple d'Espagnols à vélo à qui j'apporte une petite aide après avoir posé mon sac. La jeune femme a failli tomber à cause d'une pierre glissante. Quelques dizaines de mètres plus loin, nous nous arrêtons pour discuter et boire un coup de flotte bien sur. Le jeune homme parle très bien notre langue et m'explique que depuis plusieurs semaines, ils parcourent les différents Caminos d'Espagne avant de partir définitivement de leur pays pour l'Australie. " Il n'y rien à faire ici ", me dit-il. Je peux voir dans son expression le désarroi de la jeunesse et ce que ressentent les jeunes ne croyant plus en l'avenir de leur pays. Il en est de même chez nous. Je les prends en photo avec leur appareil, ils font de même avec le mien.
Le fléchage devenant maintenant limite en qualité, j'ai un peu de mal à trouver mon chemin d'autant que j'ai rejoins une petite route asphaltee. Je me dirige dans la continuité du sens du chemin. Au bout de deux bons kilomètres, miracle, enfin une flèche jaune que l'on trouve normalement en quantité suffisante. Quant au soleil,ses dards me brûlent. Alors que mon podometre n'indique que quatorze kilomètres, et qu'il est prévu d'en faire une vingtaine, je me demande comment je vais faire. C'est alors qu'apparaît ce message écrit sur une pierre en peinture bleue : " hôtel Asturias à deux kilomètres ". Je n'hésite pas même s'il faut de nouveau sortir du chemin. Après deux bons kilomètres épuisants, je pense qu'ils ont minoré la distance, j'arrive enfin à ma fin d'étape. Pas réjouissant allez-vous peut-être penser ? Et bien pour moi ce soir - là, ce fut le Graal.
Chambre seule pour moi à 19 euros, je vais en profiter pour me requinquer en prenant le repas du midi (ce que je ne fais jamais) et repas du soir à 10 euros. En plus, lavage à la machine de tout mon linge. Que demander de plus en ce temps de canicule ?
À l'hôtel, je vais retrouver Gabrielle et Witmark, un couple d'Allemands croisés à plusieurs reprises sans pour cela avoir fait vraiment connaissance. Ils ont subi la même galère que moi. Cela va nous rapprocher.
Je vais dormir plusieurs heures dans l'après-midi, ce qui prouve bien que j'en avais un grand besoin. Et puis, en replay sur le canal du Real de Madrid, j'ai pu voir la finale de la coupe d'Europe des clubs. On ne se refait pas complètement. ..
A suivre. Alain dit Bourguignon la Passion.