
J’ai passé une bonne nuit, d’un seul bloc, dans cette salle de réunion où un lit avait été mis à ma disposition. Ce matin, je me sens plus en forme. Aucun problème d’estomac ou de mal de tête. Cela devrait donc le faire puisque j’ai 27 kilomètres à parcourir pour rejoindre à Roquefort-les-Pins l’accueil jacquaire au foyer de Charité Maria Mater. C’est une communauté catholique regroupant des laïcs et religieux. À l'exemple des premiers chrétiens, ils mettent en commun leurs biens matériels, intellectuels et spirituels. Ils accueillent et reçoivent fraternellement, sans distinction de nation, de race ou de situation sociale, tous ceux qui, croyants ou chercheurs de sens, viennent se ressourcer.

Après mon petit-déjeuner et quelques difficultés pour trouver la sortie du presbytère, me voici en route vers Vence, ma première destination. Dans ce village endormi ce dimanche matin, je trouve rapidement le marquage très bien indiqué qui me mène sur le chemin de Vence. Cela commence par une descente. C’est bien pour s’échauffer. La piste me mène directement jusqu'à l'entrée de Vence après une remontée de deux cents mètres positifs. Traversée de zones pavillonnaires, passage en surplomb, tout cela m’amène dans le cœur historique de Vence.
Ville touristique réputée accueillante pour de nombreux artistes comme Matisse, Chagall, Dubuffet… ce matin, il y a beaucoup de monde dans les rues. Si le soleil est présent, il ne fait pas trop chaud. Je profite de ce moment pour prendre un café à la terrasse d’un petit bar face à la cathédrale. C’est l’occasion d’être interpellé et d’échanger avec des gens du cru dont l’un me dira : « Vous n’êtes pas bégueule, vous ». Je pense (et j’espère) que c’était un compliment pour moi et un jugement pour d’autres.

Lorsque je me dirige vers la cathédrale de Notre-Dame de la Nativité d'origine romane datant du XIe siècle accolée à la Tour Saint Lambert, l’office dominical a commencé. Pas moyen de la visiter, il faut respecter l’engagement religieux. Je ne verrais donc pas la mosaïque de Marc Chagall, Moïse sauvé des eaux, ni le sarcophage du Ve siècle. Une autre fois… Petite cathédrale par la taille, la cathédrale initiale mérovingienne fut construite sur l’emplacement d’un temple romain dédié à Mars au Ve siècle. Elle fut le siège de l'ancien diocèse de Vence jusqu'à la Révolution. Sa façade actuelle date du XIXe siècle.
À quelques kilomètres au nord de la cité se trouve le col de Vence, hors du Chemin. Ce lieu culminant à mille mètres d’altitude fut naguère appelé le plateau du Diable. Il fut habité avant l’installation des Romains par les Némésis. Les Templiers y fondèrent une commanderie. Selon les tenants de l’ufologie et des mystères, c’est un lieu où se déroulent d’étranges phénomènes tels qu’apparitions d’ovnis, pannes électriques de batteries, photographies étranges, manifestations diverses… qui attira même une secte résolue à prendre contact avec des entités extraterrestres… Bien sûr, gardons raison.

En sortie de ville, je suis arrêté par un homme appuyé sur une Audi 4x4 qui me dit avoir fait le Chemin. En échangeant avec lui, je m’aperçois qu’il a surtout fait la tournée des Paradors. Nous ne sommes pas sur la même planète… Soyons tolérants, chacun son Chemin...
Je poursuis mon chemin qui passe par de nombreux endroits boisés. C’est vraiment magnifique. Parfois une descente est suivie d’une remontée. Pas de difficulté majeure. Je suis nettement plus en forme qu’hier. Il faut dire que je suis prudent lors de ce troisième jour de marche. Passage aux Berguières et le vallon de Cassan. Descente rapide de deux cents mètres sur la distance d'un kilomètre au Pont du Loup, suivie d’une remontée de cent cinquante mètres. Cela commence de nouveau à être dur. J’ai hâte d’arriver à Roquefort, une ancienne possession de l’abbaye de Lérins.

Le cheminement est agréable en forêt. Enfin, j’arrive dans cette petite ville de près de sept mille habitants. Rencontrant deux personnes âgées, je demande où se trouve le foyer. Elles en sortent, faisant partie de l’encadrement. Je suis très bien accueilli et installé dans une chambre située dans un pavillon. Le soir, je partage le repas en libre-service avec les membres de la communauté et des retraitants.
Rentrant ensuite dans mon logis situé au fond du parc, je constate le bel éclairage de la maison principale. Il commence à pleuvioter. J’espère que ce n’est que passager. Belle journée tranquille et récupératrice dans la solitude de la marche malgré le kilométrage effectué ce jour.
Ah ! J’allais oublier. La légende de la Chèvre d’or aux yeux incrustés de diamants est encore très présente à Roquefort avec la grotte du même nom. Mythe ou réalité ?
À suivre.
Alain, dit Bourguignon la Passion.