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Ce matin, après une bonne nuit, je prends mon petit-déjeuner seul dans la petite salle. Tout est prêt sur la table, je ne vois personne. Il est temps de reprendre la route pour me rendre au Sanctuaire du Mont-Saint-Odile, un lieu mythique.

En sortant, je suis obligé de couvrir mon sac à dos tant il pleut et fait froid. Décidément, le temps n’est pas avec moi. Les premiers kilomètres sont sans difficulté, ce qui est bon pour réchauffer les muscles. Je passe par des chemins forestiers dans les petits villages de Bœrsch puis Ottrott.

Ce qui me gêne un peu, ce sont les changements constants du balisage. Il faut donc faire très attention au moindre changement. Entre ces deux villages, la petite Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne dédiée à Notre-Dame de la Consolation attire mon attention. Je suis désormais le Sentier des Pèlerins, le bien nommé, qui monte à travers la forêt. Par moments, je suis obligé de faire une pause pour reprendre mon souffle.

Bœrsch puis Ottrott, Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne.
Bœrsch puis Ottrott, Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne.
Bœrsch puis Ottrott, Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne.
Bœrsch puis Ottrott, Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne.

Bœrsch puis Ottrott, Chapelle Notre-Dame-des-Neiges-au-Chêne.

Au bout de huit kilomètres environ, dans la pluie et le brouillard, j’arrive au Mur Païen entourant le Sanctuaire du Mont-Saint-Odile. Ce mur, long d’une dizaine de kilomètres, entoure la montagne située à environ 800 mètres d’altitude. Il fait froid, je ne vais pas pouvoir jouir de la vue sur la vallée. Ce n’est pas bien grave, ce sont les aléas du Chemin. Et puis, je ne suis que de passage, dormant dans la plaine.

Qui est donc sainte Odile, la patronne de l’Alsace ? Fille chétive et aveugle du duc d’Alsace sous Dagobert II, son père ordonna qu’on la tue. Son épouse l’en dissuada et la confia à une nourrice avant qu’elle ne rejoigne les Sœurs de Palm, en Bourgogne (aujourd’hui, Baume-les-Dames). Baptisée à l’âge de 12 ans, elle recouvre la vue tant et si bien qu’on la surnomme « Odile, fille de lumière ». 

Souhaitant revenir chez ses parents, Hugues, son petit frère vint la chercher malgré le refus formel de son père. Furieux, le père frappa mortellement le garçon dans un accès de colère. Saisi par le repentir, il toléra la présence de sa fille, et projeta de la marier à un seigneur de son choix. Par amour pour Dieu, Odile refusa ce mariage. Devant l’obstination de son père, elle s’enfuit, poursuivie jusqu’en Forêt Noire où, selon la tradition, un rocher s’ouvrit pour qu’elle s’y réfugie.

Comprenant le destin d’Odile, son père abandonna son projet, lui donnant le château de Hohenbourg. Bientôt, de nombreuses filles la rejoignirent pour mener une vie de prière et de charité. Elle fonda un second monastère à Niedermunster, au pied du Mont-Sainte-Odile pour y accueillir les pauvres et les infirmes. Un jour, rencontrant un mendiant aveugle et assoiffé, elle frappa sur la roche. Il en sortit une eau bienfaisante qui, depuis, ne cesse de couler.

   À la mort de son père, Odile obtint pour lui sa délivrance des tourments de l’enfer. Elle poursuivit son œuvre jusqu’à sa mort, son corps étant déposé dans un sarcophage visible dans la Chapelle du Tombeau. Cette chapelle fut, par décision du pape Benoît XVI en 2006, élevée en basilique mineure.

   Il ne subsiste rien de l’abbaye primitive créée vers 680 par Sainte-Odile, hormis son sarcophage et celui de ses parents. Les parties les plus anciennes visibles de nos jours remontent à l’époque romane, principalement des constructions de la deuxième moitié du 12e siècle.

   Frigorifié, j’ai pris un repas simple à la cantine du Mont (soupe et pâtes) avant de reprendre mon cheminement.

La descente est rapide en suivant le Sentier du Mur Païen, puis le GR5 vosgien, passant devant la fontaine d’Odile indiquée ci-dessus, en direction de Niedermunster.

   Le chemin continue en passant par Barr, Mittelbergheim, Andlau. Ce village vinicole chargé d’histoire est porteur d’une légende mettant en scène l’impératrice Richarde, épouse de Charles le Gros, arrière-petit-fils de Charlemagne, empereur d’Occident.

Du Mont-Saint-Odile à Andlau.
Du Mont-Saint-Odile à Andlau.
Du Mont-Saint-Odile à Andlau.
Du Mont-Saint-Odile à Andlau.
Du Mont-Saint-Odile à Andlau.

Du Mont-Saint-Odile à Andlau.

   Vers 880, se trouvant au Mont-Saint-Odile, elle vit en rêve un ange lui dire : « À l’endroit où tu verras une ourse gratter la terre, tu élèveras une abbaye dédiée à la Vierge ». En passant par la forêt du Val d’Éléon, devenu Andlau, elle vit une ourse le faire avant de se coucher à ses pieds. À cet endroit, elle fit édifier une abbaye pour les femmes de la noblesse. Cette légende est vivace avec l’omniprésence de l’ours dans le village. L’abbaye devint un lieu de pèlerinage dédié à la Vierge et au culte de sainte Richarde. C’est l’un des plus anciens pèlerinages d’Alsace.

Le temps s’est réchauffé, la pluie est un mauvais souvenir bien que mes chaussures soient trempées. Il est temps de repartir en direction de Bernardvillé à travers des bois et des vignes. Je rejoins l’abbaye Notre-Dame de Baumgarten qui accueille les pèlerins. Cette communauté de sœurs contemplatives de l’Ordre Cistercien de la Stricte Observance était installée au village d’Ergersheim. En 2009, après 114 années de présence, elles doivent quitter leur abbaye devenue trop vaste pour ce lieu enchanteur au milieu des vignes. Hormis la prière et le recueillement, cette communauté vit de ses activités : la confection de vêtements liturgiques, la fabrication de fruits séchés et bien sûr de l’accueil.

Mon accueil est particulièrement affable, étant trempé et frigorifié. Les locaux sont relativement neufs. La sœur hôtelière me donne une chambre simple et confortable. Après la douche bien chaude, le lavage du linge et un peu de repos (le quotidien, en fait), il est 18 h (oui ! c’est tôt), et donc l’heure de prendre le dîner en commun avec les retraitants présents et l’aumônier de la communauté. Belle discussion sur le pèlerinage comme je le pratique.

   À 19 h 45, c’est le temps des Complies chantées auxquelles j’assiste dans la chapelle, en compagnie des sœurs et de quelques laïcs. Je suis le seul pèlerin. Cette communauté respecte la devise édictée par Benoit de Nursie en l’an 529 au Mont-Cassin (Italie), à savoir Ora et Labora : prie et travaille. Elle respecte aussi la liturgie des heures, le temps de prière étant réparti tout au long de la journée en plusieurs offices. Les principaux sont (de 4 h 20 du matin à 19 h 45 le soir) : Vigiles, Laudes, Prime, Tierce, Sexte, None, Vêpres et Complies.

   Journée très riche, très proche de la réflexion sur le dépassement du quotidien. C’est heureux que rapidement je m’endors.

   À demain… Alain, dit Bourguignon la Passion.

Tag(s) : #De Strasbourg, #en 2019
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