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Publié par Alain Lequien

   Un gros orage tomba sur la région à tel point que la verrière du hall de l’hôtel fut transpercée et que l’eau s’infiltra en coulant comme une colonne. Un vrai désastre. Les membres du personnel couraient dans tous les sens pour pailler aux dégâts. D’après les personnes présentes, c’est coutumier dans la région. Puissant, rapide, avec beaucoup d’eau et sans suite. Cela eut pour effet que le matin, la température avait baissée, idéale pour marcher tôt.

   Croyant Bjorn déjà parti, je prends la route vers 6h30. En réalité, il était encore aux toilettes. Il me rejoignit quelques kilomètres plus loin à marche rapide. Nous continuons notre chemin sur un long chemin forestier de douze kilomètres, nos ombres formées par le soleil levant.

   Passionné de la forêt, il me fait sentir les différentes odeurs du bois, en fonction de l’essence et de la date de la coupe. Je n’avais jamais porté attention à cela.   

Nous rejoignons San Juan de Ortega où nous devons prendre notre breakfast vers 9h00. Je prends le temps de jeter un œil à la magnifique chapelle San Nicolás. Le monastère de San Juan de Ortega créé par l'ordre espagnol de Saint Jérôme est dédié au saint cantonnier, en français saint Jean des Orties. Fermée, je ne peux pas visiter le tombeau du saint qui représente sa vie notamment son voyage à Jérusalem. Une autre fois, peut-être ?

   Ramon, qui a dormi au gîte municipal, parti trente minutes plus tôt que nous est déjà attablé. D’autres pèlerins à vélo ou à pied arrivent peu à peu. Bjorn, voyant un chien affamé lui donne des morceaux du gâteau glané sur les tables. L’animal passa de table en table pour se faire nourrir et caresser en même temps.

   Nous reprenons la route vers Agés, puis Atapuerca, une cité rendue célèbre par des découvertes archéologiques.

À Gran Dolina, on y a découvert plusieurs restes humains datés entre 1 200 000 et 800 000 ans, et la plus ancienne trace de cannibalisme. Les deux grands sites ont été déclarés site du patrimoine mondial par l'UNESCO en l’an 2000.

   Nous profitons d’un lieu formé de bassins antiques où devaient se dérouler de nombreuses cérémonies des populations préceltiques. Très érudit, Bjorn m’en explique la présence dans les pays nordiques de ceux qui sont appelés les peuples de la pierre.

La présence d’un Albanais touriste gêne notre ami – il ressent des ondes négatives – ce qui fait que nous abrégeons la durée de notre présence 

   À la sortie de la ville, nous pouvons admirer une reproduction de l’homme préhistorique qui fut découvert en ce lieu, l'Homo antecessor, le premier Européen.

   Nous entreprenons la dure montée de l’alto de Matagrande à 1100 mètres d’altitude, où l’on découvre un cercle représentant les grands cycles de la vie en forme d’escargot. Sur les hauteurs, un marcheur ou pèlerin japonais accepte de nous prendre en photo pour immortaliser ce moment sous la croix construite ultérieurement. De loin, on aperçoit la grande ville de Burgos.  

Deux voies s’offrent à nous. Nous choisissons la plus longue plus accessible passant par Cardenuela la Riopico où nous nous arrêtons pour boire un verre. Nous sommes rejoints par Ramon et un autre pèlerin. Alors que nous discutions avec une Australienne très heureuse de parcourir le Camino, Charles, rencontré à Los Arcos, arrive en compagnie d’un groupe bruyant. Nous sommes contents de nous revoir mutuellement me disant qu’il se sent beaucoup mieux maintenant. En effet, il rayonne, cela ne peut que me faire plaisir. C’est un véritable changement par rapport à notre rencontre précédente. Le Camino agit…

   Il est temps de rejoindre Burgos. Bjorn souffrant malgré sa forme physique des ligaments et votre serviteur des pieds, nous nous posons la question si nous prenons ou pas le bus à Villafria pour parcourir les dix derniers kilomètres traversant des zones commerciales. Certes, l’intérêt culturel n’est pas certain, mais le Camino est le Camino.

   Nous décidons de… décider en arrivant à Villafria. Arrivés dans la cité, nous décidons de continuer. Nous suivons une longue route sans grand intérêt. Bjorn apercevant une publicité vantant Burger King veut y passer pour manger un burger. Nous y allons au détriment de la nourriture saine prise jusque-là. Nous sommes déçus à la fois par la qualité très moyenne et la cherté des produits. Un moyen pour moi de me moquer gentiment de mon compagnon de route suédois. 

Traversant la vieille ville, nous arrivons dans le refuge communal  de 172 lits réalisé dans un immeuble situé près de la cathédrale. Que dire ? C’est moderne, c’est bruyant, il fait chaud, c'est une usine à pèlerins. En fait, rien de comparable avec ces petits refuges humains où la convivialité prend tout son sens. Ici, pas de fraternité du Chemin, c'est le règne de l’individualisme.

   À l’intérieur, de nombreux jeunes de toutes nationalités parlent fort, sans respect pour ceux qui ont besoin de dormir. Je ne suis pas anti jeunes en disant cela, loin de là, mais il y a une limite.

Et faire du bruit jusqu’à trois heures du matin, c'est trop. Heureusement, l'orage qui s’abat sur la ville va calmer les ardeurs des fêtards pendant une heure. Bref, nous n’avons pas pris un repos bien mérité après ces trente-neuf kilomètres.

   Entretemps, je vais visiter la cathédrale gothique Santa Maria inscrite au patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO. Datant du XIIIe siècle, sa façade principale est la porte du Pardon. De chaque côté se dressent d'imposantes tours de 84 mètres de haut. Le plus bel ensemble sculptural est sans conteste la porte du Sarmental où trône le Christ en majesté entouré des apôtres et évangélistes.

   Une chapelle m’attire particulièrement comme jacquet, celle de saint Jacques. Par ailleurs, j’apprends que Rodrigo Díaz de Vivar dit le Cid, et son épouse Doña Jimena dite Chimène, héros présents dans la pièce de Corneille ont leurs tombeaux présents dans la cathédrale.

   À 19h30, j’assiste dans une chapelle latérale à la messe des pèlerins. Il y avait longtemps que je n’avais pas assisté à un office. Il fut poignant en présence de nombreux jeunes de toutes nationalités. J’en ai retiré une grande émotion.

   À demain - Alain, Bourguignon la Passion.

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