
L’étape du jour fait le lien entre le massif de la Sainte-Baume et celui de la Sainte-Victoire. À quelques dizaines de kilomètres de distance, les deux sœurs provençales se font face. « Elles sont aussi différentes que le soleil peut l'être de la lune », nous disent les auteurs Pierre Garcin et Nicolas Lacroix. Deux montagnes, deux mondes. La Sainte-Baume, magnifique ombre boisée habitée du souvenir des ermites... ; la Sainte-Victoire, solaire, minérale, hantée par les visions de Cézanne.

Le départ s’effectue par temps frais et un soleil hésitant sans petit-déjeuner : il faudrait attendre en effet 8h30 pour en bénéficier, ce qui est un peu tard pour prendre la route. Tant pis…
Je remonte en partie le chemin des Rois parcouru hier avec Gilbert, puis je continue cette même voie par le chemin empierré en direction de Nans-les-Pins en passant devant plusieurs oratoires. Avant ce village, la piste fait place à un large chemin agréable.

Le soleil commence à faire des siennes. Heureusement que je passe par des zones ombragées. Progressivement, en passant par plusieurs gués et le sommet de la Mouère, j’arrive à Saint-Zacharie, une petite ville de trois mille habitants.

Au IXe siècle, la région était occupée par les Sarrazins, le village s’appelait alors Rastoin. Lorsque Guillaume, comte de Provence commença à les chasser, le lieu fut de nouveau christianisé et prit le nom que nous lui connaissons. Dans les traditions chrétiennes et musulmanes, Zacharie était le père de Jean le Baptiste qui baptisa Jésus-Christ. Je profite de mon passage pour y prendre le double café qui m’a manqué ce matin même s’il fait chaud.

À la sortie, je monte une petite route raide suivie de chemins qui m’amènent à La Castillonne. Pendant trois kilomètres de sentiers de montagne, je vais ainsi monter trois cents mètres de dénivelé positif à travers la forêt et les rochers. Au Pas de La Couelle, j’atteins l’ermitage Saint-Jean du Puy bâti par Jean Cassien, le moine fondateur de l’abbaye Saint-Victor de Marseille au Ve siècle, sur l’emplacement d’un temple romain dédié à Diane. Rebâti au IXe siècle, le lieu fut entretenu pendant plusieurs siècles par des ermites. La chapelle est fermée pour cause de travaux. Le lieu est surtout fréquenté par les randonneurs. Il est aménagé comme tel avec un refuge rustique (le refuge Léon Baille) et un abri très sommaire.
Trets : ermitage Saint-Jean du Puy.

C’est maintenant la longue descente vers Trets au milieu de la forêt, des vignes et des lotissements modernes. Je m’y repose une demi-heure avant de reprendre la route vers Puyloubier que j’atteins vers 18h00. Aujourd'hui, hors arrêts, j'ai marché environ neuf heures.
Puyloubier est situé sous les masses rocheuses bleutées du massif de la Sainte-Victoire. Perché sur un éperon entouré de contreforts boisés, son nom d'origine médiévale, podium luperium signifie la colline aux loups.

De nos jours, il abrite le plus grand vignoble du département produisant le Cote de Provence-Sainte-Victoire.
Je suis bien accueilli au gite rural Gorgeon où je prends la demi-pension. Endroit calme, simple, nourriture de bon aloi, gentillesse. Un bel accueil.
À suivre.
Alain, dit Bourguignon la Passion.