Etape 56 - Castronuno - Villafranca del Duro - Toro - 33 km - (1 377 km)
Le lit était confortable mais je n'ai pas beaucoup dormi. Et toute cette journée va être prise à réfléchir de nouveau sur l'irrespect de la vie humaine par des gens dérangés. Je m'aperçois qu'être sur le Chemin n'est pas neutre. Si j'avais été chez moi, devant la tv, j'aurai très certainement passé du temps devant en plaignant ces pauvres victimes. J'aurai échangé avec des amis, avec mon épouse chérie.
Sur le Chemin, je suis seul face à ma solitude. Je porte désormais un brassard noir en signe de deuil pour nos morts, mais aussi les blessés et les familles touchées par ce drame. Ici, tout prend une autre dimension car c'est vraiment le Alain de l'intérieur qui répond. Et, celui-ci laisse passer ses émotions sans avoir peur de la réaction des autres, de certains bien-pensants qui considèrent qu'avoir un peu de faiblesse est une tare. Je crois que ceux-la, sans s'en rendre compte, jouent au théâtre de la vie. Et donc, qu'ils ne sont pas véritablement vrais. D'où la nécessité de se confronter avec soi-même. Et cette confrontation ne doit pas être purement intellectuelle, elle doit se réaliser dans la souffrance avec une certaine humilité. Ce Chemin m'apprend beaucoup de choses sans que je m'en rendes compte.
Et toujours un chemin magnifique de couleurs.
Le chemin reste à peu près toujours à la même altitude ce qui fait que le cheminement n'est pas difficile en soi, sauf bien sur toujours cette chaleur prégnante autour de trente-trois et trente-six degrés. Bien sur, il y a des montées et des descentes, mais le paysage et tellement beau. Et puis, le plus difficile est l'arrivée à Toro sur sa colline.
Les quatre cents derniers mètres se deroulent en plein cagnard. Mais, cette beauté... Je me faisais un plaisir de dormir au monastère, mais en y arrivant, j'ai appris que le refuge géré par les soeurs dominicaines était désormais fermé. Seule proposition peu chère de l'office du tourisme (la préposée a été très aimable) fut de dormir dans une pension sur la Plaza Mayor.
Un monde où il fait bon vivre.
C'était bien en soi, mais donnant sur la place, je n'ai pas beaucoup dormi car c'était un samedi soir. Par contre, j'ai pu assister au passage de la Vierge portée par plusieurs hommes qui se relayaient tant cela semblait peser. Le tout, accompagné d'une fanfare d'une cinquantaine de musiciens tous habillés de blanc. C'était très beau et émouvant sous les yeux du public assis aux terasse des cafés. Mais, peu de monde dans la procession, juste quatre religieux et une vingtaine de personnes.
Vers l'arrivée à Toro.
Toro - procession et églises.
Toro - église.
En résumé, sans cette chaleur, la marche serait facile. Si bien qu'au-dela de mes propres réflexions, quand la fatigue devient importante, la réalité de ce quotidien reprends le dessus. Et parfois le découragement. Faut-il vraiment souffrir pour apprendre sur soi-même ?
Pour les néophytes du Chemin, cela va vous sembler évident sans que cela soit exclusif, évitez si possible les temps de forte chaleur. Bien que, parfois à quelques jours près, la température peut être très différente. Ce n'est pas Joao qui me dementirait.
À suivre. Alain dit Bourguignon la Passion.